Summer

Monica Sabolo

3' de lecture

Ni un roman noir, ni un thriller, tout sauf un roman policier, alors que vient faire ce Summer dans le site réserve aux durs à cuire ? De fait, il s’agit bien d’une enquête, celle de Benjamin, presque quadra, névrosé, suicidaire, paumé, qui cherche à comprendre ce qu’est devenue sa sœur ainée, prénommée Summer (titre du roman) et disparue il y a près de vingt-quatre ans, en plein pique-nique sous un soleil radieux. Il tente avec un psy d’élucider le pourquoi et le comment de cette dissipation et les conséquentes psychologiques désastreuses sur lui-même et sa famille.

Famille dorée, très « upper class », vivant sur les bords du lac Léman dans la quiétude et la sérénité des banlieues résidentielles chics genevoises, présidée par un père avocat et vainqueur magnifique, aux côtés duquel fait semblant de s’épanouir une femme élégante et belle comme un trophée et avec une sœur, Summer donc, qui fait tourner la tête de tous les garçons, entourée de jeunes filles de la jetset aussi délurées et rayonnantes qu’effacé, maladroit et timide qu’est Benjamin, adolescent tourmenté, âgé de 14 ans aux moments de la disparition.

Rongé par la culpabilité, par l’absence inexpliquée de cette sœur vénérée, il va plonger dans les tréfonds de son âme, quitte à creuser et écailler le vernis de sa famille à qui tout semble réussir, mais qui ne se remettra jamais de cette disparition. Est-elle partie, est-elle morte, a-t-elle été tuée, kidnappée, tant d’incertitudes et de questionnements qui le taraudent et ont transformé sa vie en enfer de névrose et d’asociabilité pendant toutes ses années.

Par touches successives, Monica Sabolo, décrit le cheminement de Benjamin, tantôt presque quadra délabré, tant adolescent timide au rythme des flash-backs et des plongées oniriques dans cette période adolescente ou Summer rayonnait. La délicate façon d’effleurer la surface des sentiments tout en creusant profond sur les conséquences de situations mal vécues permette à Monica Sabolo de construire une sorte de thriller onirique, qui tenterai de nous plonger dans un climat de rêverie permanente pour mieux masquer ou fuir une réalité par trop évidente mais que l’on ne veut surtout pas voir de peur de l’affronter. Elle en dit peu et beaucoup à la fois, elle distille avec pertinence et progressivité les avancées de Benjamin qui vont l’amener à découvrir la vérité, une vérité qu’il pressentait déjà adolescent mais qu’il se refusait à accepter. Vérité qu’en bon lecteur, on pressent également assez rapidement.

Mais peu importe cette facilité, peu importe si on est très loin du style hardboiled, ce roman est une petite perle à découvrir et savourer, le temps d’une fugue onirique pour voir tranquillement remonter à la surface des eaux calmes du lac, une horreur indicible mais tellement prévisible.

Déjanté
Prendre les loups pour des chiens