Gertrude Walker

la Garce idéale

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Première femme à être publiée dans la collection de la Série Noire, elle est également celle qui aura le mieux dépeint la femme criminelle la plus impitoyable et la plus garce des romans noirs des premières années (d’ou le titre un peu raccourci que je me suis autorisé). Elle signe l’un des romans incontournables de la collection avec A Contre Voie, dans lequel le pauvre Walter Johnson va tomber dans les rets de la évidemment très blonde Elizabeth Frazer qui de manipulations en agacements va le conduire vers des sentiers où les relations de couples s’aventurent rarement. Avec ce superbe roman méconnu, elle peut prétendre d’emblée à une place de choix dans les grands du polar Hardboiled et comme le dira un critique du New Yorker lors de la sortie du livre : Elle est le seul auteur féminin à écrire comme James Cain.

A contre voie, un polar de Gertrude Walker
A contre voie, un polar de Gertrude Walker à la manière de James Mc Cain
Elle est née en 1905 dans l’Ohio et obtient son diplôme de journalisme après des études universitaires à Columbus. Elle sera critique de théâtre, publiera divers articles et interviews de stars dans Modern Screen et London Picture.

Elle sera même comédienne à Hollywood, avec des petits boulots pour des théâtres et au Pasadena Playhouse. On la verra même après la guerre, chanteuse de night-club au Café Gala sur le Sunset Strip. Membre à part entière du monde du cinéma hollywoodien, elle écrira évidemment des histoires et des scénarii, avec en particulier en 1947 Railroaded (l’Engrenage fatal) d’Anthony Mann, film dans lequel, le hold-up d’une salle de paris clandestins tourne mal et un policier est abattu. Un coupable idéal est arrêté, mais l’enquête que mène inspecteur Ferguson le conduit vers un redoutable assassin. D’ailleurs, un des intérêts du film est que le réalisateur s’intéresse beaucoup plus au tueur psychopathe qu’aux plus classiques bons et victimes innocentes.

Getrude Walker continue sa coopération avec le septième art au travers des scenarii de Ment Partner (1944), End of the Road (1944), Crime of the Century (1946), et encore Insurance Investigator (1951), faisant d’elle une sorte de reine de la série B. Elle écrira également pour la télévision. Ce n’est pas A Contre Voie mais Desire for Living, qui obtiendra un prix littéraire, le Literary America Award. Elle décède en 1995.

La pluie tombe sur les traverses de la voie ferrée et sur cet homme solitaire,debout sur le talus, qui a les mains enfoncées dans ses poches, le col relevé, et qui a faim. Alors, quand le vagabond voit s’ouvrir la fenêtre de la maison d’en face, sur la lumière et la tiédeur d’un foyer, quand une femme blonde se penche par cette fenêtre pour lui faire un signe d’appel, il veut croire que l’étape lui sera douce, que le destin l’a enfin pris en amitié,-il espère surtout qu’il pourra resquiller un sandwich. Quand on a faim et que la pluie vous dégouline dans le cou, on n’est guère disposé à être prudent, ou clairvoyant, ou difficile. On est incapable de deviner un piège dans la médiocrité confortable d’un appartement bourgeois, le mensonge dans le geste hospitalier d’une ménagère, la grimace du démon derrière le sourire éblouissant d’une femme…Walter Johnson s’est laissé avoir et Walter Johnson va payer son erreur, au prix fort.
  • À contre-voie, (So Deadly Fair)
  • L’Été en Californie
  • Desire for Living
  • Diamonds Don’t Burn
  • The Suspect
James Mc Cain
Geoffrey Homes